Emmanuelle Hervé est la fondatrice et directrice d’EH&A Consulting, cabinet de gestion de crise et de communication sensible.Stéphane Roussier est président de SRF FINANCE Conseil, est spécialiste en management de crise des entreprises en difficultés.Avec d’autres experts, ils ont fondé la Restructuring Task Force.
La crise sanitaire et ses
conséquences (confinements, arrêt total et/ou partiel des activités) produira
sur le long terme une crise économique d’ampleur inédite au sein des
entreprises.
Pourtant, le nombre de procédures
collectives sur l’année 2020 a diminué de 25% (selon l’OCED). Nos entreprises
ont tenu, en partie grâce aux aides d’État. Viendra le moment de rembourser et
de faire face aux difficultés engendrées par la crise.
Comment redresser nos
entreprises françaises face au mur de la dette ?
« Dans notre métier de gestion de crise, il est absolument fondamental de combattre un des biais cognitifs les plus fréquents qui est le déni de la situation. » Emmanuelle Hervé
Les entreprises qui subiront
cette crise ne doivent pas hésiter à être transparentes par rapport à cette
situation ; auprès de leurs employés, mais aussi vis-à-vis des
fournisseurs et des clients. Pour ce faire, elles auront besoin de
professionnels de la communication pour les guider et anticiper au mieux une
sortie de crise. Des changements vont donc parfois être nécessaires. Il va
falloir que ces acteurs économiques affrontent cette situation.
« Toutes les entreprises
connaissent un jour ou l’autre des difficultés » nous rappelle
Stéphane Roussier.Le sentiment de culpabilité qui pourrait en
résulter serait contre-productif. Cette crise sanitaire doublée d’une crise économique
obligera dans les prochains mois les entreprises à faire face à leurs
difficultés.
Des changements vont être
nécessaires, des emplois vont être menacés et il va falloir le dire et agir en
conséquence. Et puisque « les entreprises françaises ont plutôt recours
à l’endettement et à l’emprunt pour financer leur développement » selon
Stéphane Roussier, Il faudra s’attendre au printemps prochain à ce qu’elles se
retrouvent dans des situations très difficiles face à de potentiels
surendettements. La survenance simultanée de plusieurs signaux d’alerte seront
des indicateurs clés d’une crise à venir. Il s’agira de réagir et de
communiquer avant la potentielle cessation de paiement.
Quelles sont les bonnes
pratiques pour éviter aux entreprises l’état de cessation de paiement ?
Faire évoluer sa stratégie et ne pas avoir peur de communiquer
La mise en place d’un plan de
retournement est nécessaire à l’entreprise pour pouvoir s’en sortir :
faire des concessions et de nouveaux accords avec les tierces parties.
« La 1ère étape de sortie
de crise est de recréer le cash-flow, sans étrangler les fournisseurs : il
faut un équilibre entre l’excédent brut d’exploitation et le cash-flow. »
Stéphane Roussier
Plus vite la situation est
acceptée, plus vite une sortie de crise moins dramatique pourrait être
envisagée. D’où l’importance de travailler avec des agences spécialisées dans
le domaine, pour maintenir la confiance des parties prenantes (internes
et externes) : l’unique stratégie qui tiendra sur le long terme.
En temps de crise, la
communication en interne est fondamentale. Elle doit être à ce moment-là claire
et transparente envers les employés, qui ne s’inquiètent jamais autant que
lorsqu’ils ne connaissent pas la réalité de la situation.
Cependant, il ne suffit pas de
tout dévoiler sans réflexion, il faut annoncer les choses dans un ordre
préétabli : « voici la situation actuelle, voilà ce qui nous a
conduit à prendre telles décisions aujourd’hui, voilà ce qui fait que nous
sommes forts de nos projets futurs et que nous allons y arriver ».
Pour convaincre, il faudra
travailler la crédibilité du chef d’entreprise et mettre en place des projets :
il ne s’agit pas uniquement de « tenir » mais également de
construire, de s’adapter et de se projeter dans le futur.
« C’est par exemple le cas d’une
entreprise dans le Jura que nous avons accompagné afin de lui éviter de tomber
sur le coup d’un redressement judiciaire. Elle a bénéficié d’une mobilisation
locale et nationale, réussie grâce à la capacité d’entente du chef d’entreprise
avec les différents syndicats de la région. Une manifestation conjointe avec la
ville, la direction de l’entreprise et ses employés a pu être organisée afin de
prouver la valeur de la société en question dans cette ville. » Emmanuelle
Hervé
Une communication franche permet
ainsi de ne pas aliéner ses parties prenantes en interne, mais aussi de
maintenir la confiance de ses fournisseurs, partenaires et clients.
Il incombe donc aux
professionnels de la communication de rendre compréhensibleles différentes
actions en cours.
Cette crise sanitaire aura certes
réduit les contacts humains, mais elle n’empêchera ni la solidarité, ni
l’entraide, et au contraire, elle les renforcera.
La
crise sanitaire que nous connaissons depuis le printemps aura eu un effet
concret sur l’organisation du travail. Elle a mis en lumière ce qui, avant,
demeurait limité : le télétravail (17% des actifs y avaient déjà eu
recours avant le premier confinement[1],
seulement 12% télétravaillaient au moins un jour par mois, il y a huit ans[2]).
Par
effet de cliquet, il est depuis venu s’imposer. Certains grands groupes ont
annoncé sa généralisation, comme PSA, souhaitant, dès lors, revoir en
profondeur leur organisation. Côtés salariés, même s’il ne s’applique pas à
tous, le télétravail a suscité un certain engouement (44% des actifs ayant pu
télétravailler au printemps l’ont fait, 79% souhaiteraient y recourir plus
souvent[3]).
Pourquoi devriez-vous porter une attention particulière aux
conséquences de cette nouvelle organisation ? :
Ce
plébiscite ne doit pas occulter les risques liés à sa pratique. Car si cette
nouvelle organisation a nourri nombre de débats et occupé le temps médiatique, la
conjugaison d’effets inhérents représente autant de facteurs de crises pour
l’entreprise qui n’ont cependant été peu observés.
Pour l’employé, travailler en dehors d’un
espace de travail destiné par essence à cet usage fait naître de nouveaux
enjeux physiques et psychologiques. La moindre distinction entre univers
personnel et professionnel, la « néotaylorisation »[4] et le surcroit de travail constaté
associés à l’absence de lien social et la dégradation des relations (40% des
télétravailleurs[5]) laissent présager un accroissement des
risques psychosociaux (burn-out, arrêts de travail…). Et les nouvelles
conditions du deuxième confinement (maintien de l’école) ne les ont pas
réduits : « On est reparti à l’identique, sans
prendre le temps de stabiliser de nouveaux modes de fonctionnement à
distance, note Natalène
Levieil, spécialiste des risques psychosociaux au sein du cabinet LHH
(ex-Altedia). En mars, on
avait vu venir les problèmes d’isolement pour les personnes fragiles, ou de
chevauchement vie privée-vie professionnelle, mais on n’avait pas anticipé la
montée des tensions au sein des équipes »[6].
Dans
un premier temps, ces risques psycho-sociaux sont couverts par les organismes
sociaux : les indemnités journalières versées en cas d’arrêt maladie ont
augmenté de 29,9 % entre janvier et août, pour l’Assurance Maladie[7]. L’entreprise
pourraient néanmoins en subir les répercussions sur son organisation (moindre
mobilisation disponible) et, à moyen terme, sur ses finances (hausse des
charges sociales, procédures juridictionnelles…).
Le télétravail, par ailleurs, étend la
responsabilité de l’entreprise aux accidents du télétravailleur à domicile.
L’employeur, étant tenu vis-à-vis de ses salariés à une obligation de sécurité
de résultat, doit prendre les mesures nécessaires pour préserver leur santé et
assurer leur sécurité.
« Le Code du travail prévoit expressément, pour
l’employeur, les mêmes obligations en matière de prévention des risques
professionnels à l’égard de tous ses salariés, y compris ceux en télétravail.Ainsi,
l’accident survenu sur le lieu du télétravail pendant l’exercice de l’activité
professionnelle du télétravailleur est présumé être un accident de travail au
sens des dispositions de l’article L. 411-1 du Code de la
sécurité sociale. Si l’employeur
peut contester le caractère professionnel de cet accident, il est en pratique
difficile pour lui de démontrer qu’il a eu lieu en dehors du temps de travail
ou est dû à une cause totalement étrangère au travail. » Maîtres Benoît Charot, Olivier Rivoal et Yéléna
Nobou, avocats[8]
L’absence
d’universalité du télétravail annonce un autre écueil. Le fossé pourrait se
renforcer entre les postes pouvant en bénéficier et les autres. Cette nouvelle
distinction cols bleus / cols blancs touche la société dans son ensemble. Pour
les entreprises concernées le sujet est tout aussi primordial ; « cette crise accentue la
fracture sociale », confirme, ainsi, Christophe Debien, psychiatre et
responsable de pôle au Centre national de ressources et de résilience (CN2R)[9]. Celle-ci génère une rupture de la confiance et
de l’écoute entre les employés et leur management qui se révélera préjudiciable
en situation de crise.
Les
risques intrinsèques apparaissent plus évidents. L’organisation en distanciel
complexifie et impacte la sécurisation des données. Les télétravailleurs ont
chez eux recours à des connections Wi-Fi non-sécurisées.
« Avec
le télétravail, il arrive que les employés se connectent au système
informatique de la mauvaise manière » Alessandro Roccati
Senior VP de Moody’s coauteur de l’étude sur la hausse des cyberattaques contre
les banques durant le confinement[10].
Le
point vient s’aggraver pour ceux qui choisissent un lieu public à la merci des
regards indiscrets. Il est ici intéressant de noter que les employés des jeunes
entreprises sont plus négligents vis à vis des données sensibles. D’après une
étude du spécialiste du stockage et de la gestion d’informations, Iron Moutain,
parmi les employés sondés au sein de ces entreprises, 48% admettent avoir
laissé des documents sensibles à la vue de tous dans un bureau, les avoir
traités négligemment ou même les avoir oubliés ou égarés dans un lieu public. Soit
deux fois plus que dans les sociétés plus établies (23% des employés)[11].
De
nombreuses organisations tolèrent, par ailleurs, d’autres mises en péril :
l’utilisation de messageries personnelles pour l’échange de documents
professionnels (50 % des télétravailleurs) ou leur non-destruction (19 %
d’entre eux jettent leurs documents à la poubelle)[12]. Au
delà d’évoquer l’ampleur de la menace des cyberattaques – elles ont triplé
contre les banques pendant le premier confinement[13] – les
organisations doivent accroitre leur vigilance face à cette mise à disposition
de données sensibles supplémentaire.
« Les entreprises laissent leurs employés utiliser
leur ressource la plus précieuse, à savoir leurs données, en dehors du bureau
sans même leur offrir les moyens d’appliquer les meilleures pratiques de
gestion de l’information, notamment de stockage et de destruction sécurisés. Il
est essentiel qu’elles étendent leurs procédures de gestion de l’information à
leurs télétravailleurs et salariés distants. Et pas seulement pour leurs
données numériques, mais aussi pour leurs documents papier, tout aussi
susceptibles de tomber entre de mauvaises mains » alertait
dès 2013, Marc Delhaie, Président-Directeur général d’Iron Mountain France[14]
Concomitamment,
les conditions de travail évoquées rendent plus difficile le respect des normes
(droit du travail, RGPD, réglementations sectorielles particulières…). Dans
l’urgence, la vigilance portée à la conformité se réduit générant de nouveaux
risques pour l’entreprise. « L’employeur
est sans conteste le responsable du traitement des données personnelles,
rappelle Maître Jérémie Giniaux-Kats, avocat. Si, le salarié peut engager sa responsabilité en
cas de non-respect des dispositions d’une charte informatique, d’une clause de
confidentialité ou d’une charte du télétravail, en cas d’amende prononcée par
la CNIL, seul l’employeur sera tenu par la condamnation pécuniaire et ne
disposera d’aucune action récursoire contre un salarié fautif.[15]
« L’employeur doit redoubler d’efforts pour assurer la sécurité des données personnelles qu’il permet à ses salariés de traiter, lorsque ces salariés travaillent hors les murs », Maitre Jérémie Giniaux-Kats, Avocat.
Que retenir et comment mieux anticiper les crises en tenant compte de cette nouvelle organisation ?
Le télétravail, décision
collatérale au premier confinement, s’est imposé de lui-même. Ses écueils sont
essentiellement apparus empiriquement. La conjoncture exceptionnelle n’a pas
permis d’alternative. Il demeure néanmoins essentiel d’éviter l’accumulation de
nouveaux risques dans la perspective d’une crise.
Dans chaque organisation, la
manifestation d’une crise exogène à l’entreprise comme la crise sanitaire liée
au Covid-19 doit alors générer un ensemble de réflexes incontournables :
>> la constitution d’une cellule d’anticipation dès
l’annonce des premières mesures
>>
l’ouverture de la cellule de crise avec des rôles clés répondant à des missions
précises
>>
l’allégement des agendas des membres de la cellule afin qu’ils puissent
pleinement s’y consacrer
>>
la cartographie des risques et l’analyse des évolutions défavorables corollaire
>>
la bonne prise en compte de toutes les parties-prenantes en apportant un appui
particulier au dialogue et à la communication interne, éléments clés pour
éviter que des univers à deux vitesses et un climat social dégradé ne
viennent s’ajouter aux facteurs de risques déjà identifiés.
La négligence de ces procédés de
gestion de crise pourra à tout moment transformer ces exemples en nouvelles
menaces pour l’entreprises sur les plans organisationnel, juridique, financier
et réputationnel. A tout le moins, ils constitueront pour une crise potentielle
des facteurs aggravants qu’il convient d’anticiper.
« il fait partie du noyau dur de
la cellule de crise » déclare Emmanuelle HERVÉ.
Emmanuelle HERVÉ, directrice générale et
fondatrice du cabinet EH&A Consulting, est intervenue aux côtés de Émilie
BERTHIER, responsable juridique au sein d’Auchan Retail International à
l’occasion du webinaire intitulé « le juriste manager de crise », organisé
par l’Association Française des Juristes d’Entreprise (AFJE) et en partenariat
avec We Law Care.
Lors de cette intervention, Emmanuelle
Hervé est revenue sur le rôle du directeur juridique au sein de la cellule de
crise.
Une cellule de crise est ouverte lorsque
le comité exécutif (COMEX), en prenant appui sur un système d’aide expert à la
décision (ou trigger), qualifie la situation de « crise ».
C’est dans ce contexte qu’Emmanuelle
HERVÉ décrit « le noyau dur de la cellule de crise »,
autrement dit les trois fonctions indispensables à la cellule de crise :
Le
directeur de la cellule de crise ;
Le communicant ;
Le
juriste (ou directeur juridique).
Pour Emmanuelle HERVÉ, ces
trois fonctions, sont le « minimum vital » chacune ayant un
rôle précis.
S’agissant du directeur juridique, elle
précise qu’il ne faut pas hésiter à expliquer cette bonne pratique au COMEX
s’il y a une hésitation.
En effet, Emmanuelle HERVÉ assure qu’il est
fondamental de s’entourer des fonctions adhoc au sein de la cellule de crise
car c’est le « cœur de la méthodologie de la gestion de crise »
afin de « prévoir toutes les dimensions de la crise ».
Dans le cas du directeur juridique, son
rôle est nécessaire pour plusieurs raisons.
« Le juriste est le garant des actifs de
l’entreprise », déclare Émilie BERTHIER.
Le directeur juridique est un juriste. Il
doit apporter son expertise sur des éléments techniques (procédure,
responsabilité etc.)
Le directeur juridique est un garant. Son
expertise aura pour but de garantir, de protéger les actifs de l’entreprise, c’est-à-dire
la réputation, les produits, les clients, les locaux de l’entreprise concernée.
Le directeur juridique devra agir de
manière neutre, objective et bien sûr par priorité tant les tâches seront
nombreuses.
Afin d’être le plus performant possible,
le directeur juridique, comme toute personne de cellule de crise faisant partie
du « noyau dur » pourra, avoir recours à des sous-cellules.
C’est un « chef d’orchestre », précise Émilie BERTHIER.
Le directeur juridique va s’armer de
compétences, s’entourer de personnes (qui composeront les sous-cellules). Ces
personnes pourront être des avocats spécialisés dans une branche du droit par
exemple.
Le directeur juridique administrera
alors cette sous-cellule comme un véritable « chef d’orchestre ».
Toutefois, ne voyez pas la dimension
juridique, ne faisant pas équipe avec le reste de la cellule de crise, car
cette vision est totalement erronée.
En effet, « un maillage avec l’équipe de
communication »
est nécessaire comme le confirme Émilie BERTHIER.
Ce maillage permettra d’organiser la
communication avec les parties prenantes (ou stakeholders).
En effet, la difficulté à communiquer
avec les parties prenantes repose dans la prise en compte des engagements
contractuels avec les différentes parties prenantes : clients,
consommateurs etc.
Dès lors, l’objectif sera d’accorder la
communication avec les engagements contractuels, engagements juridiques.
Mais alors, pourquoi le juridique ne
communiquerait-il pas directement ?
Émilie BERTHIER nous précise que « le
directeur juridique ne se substitue pas à la communication ».
Chacun doit respecter son rôle car le
métier de communicant est très particulier, et à part de celui de directeur
juridique.
Pour finir, le directeur juridique se doit
de réagir rapidement et de se baser sur les faits afin d’établir les risques
pour les dirigeants.
Un bon contrôle du stress et une grande
faculté d’anticipation sont des compétences nécessaires chez un directeur
juridique.
Retenons qu’il est fondamental de
choisir les bonnes personnes au sein de la cellule de crise, avec des profils
différents et des antécédents différents (communication, juridique etc.) Le
directeur juridique a un rôle vital à adopter dans une cellule de crise, et
doit agir de manière neutre et objective. Il doit également donner un éclairage
juridique sur l’ensemble des points qui vont être abordés.
Par définition la crise est un événement inattendu. Cette soudaineté rend les équipes de gestion de crise tendues, sous pression, entraînant alors une fatigue. Cependant, la plupart du temps, cette pression se vit sur un laps de temps, généralement court. La fatigue accumulée bien qu’importante cesse dès lors que la crise est finie.
Toutefois, ce postulat de départ n’est pas valable dans le contexte actuel, les équipes de gestion de crise entrent dans leur 7ème mois ! Le 17 mars 2020, la population française connaissait un premier confinement. Le 28 octobre 2020 Emmanuel Macron annonçait la mise en place d’un nouveau confinement. En somme, la crise sanitaire est longue, fastidieuse et ne semble pas connaître une date de fin dans un futur proche. Ainsi, dans ce contexte d’incertitude, ménager son équipe de gestion de crise est une priorité pour le leader d’une entreprise afin de tenir sur le long terme.
Cela est d’autant plus vrai que les conséquences
de cette fatigue peuvent aller crescendo : ambiance de travail
pesante, démotivation, sentiment de solitude, manque de réactivité,
non-détection des signaux faibles, autre crise non-détectée etc…
Les employeurs qui hésitent à s’investir pour la santé psychologique risquent d’en payer le prix fort une fois la crise sanitaire passée, avec le départ et le désengagement progressifs de leurs équipes. – Christophe Nguyen, Président Empreinte Humaine, associé psychologue du travail.
Afin d’éviter cette fatigue accumulée nous vous proposons plusieurs pistes : Veillez à faire une mise au point sur ce qu’il s’est passé. L’utilisation du retour d’expérience (RETEX) est l’occasion pour vos équipes de gestion de crise d’observer ce qui a été fait et d’en tirer des conclusions. Ce RETEX vous permettra de prendre du recul sur les évènements qui ont eu lieu et de modifier le rythme de travail dans lequel vos équipes de gestion de crise se trouvaient. Autrement dit, vos équipes de gestion de crise ne seront plus dans l’anticipation de la crise (situation avant le RETEX) mais seront plutôt sur la réflexion et l’étude de ce qui a été fait pour gérer la crise (RETEX).
N’hésitez pas à communiquer de manière fluide. Vos collaborateurs doivent savoir ce que vous pensez et comment vous pensez. Cela permettra de ne pas les surprendre par une décision ou un comportement inattendu qui pourrait être source de tension. Veillez à ce que vos équipes de gestion de crise ne soient pas démotivées. Cela passe par plusieurs choses : la reconnaissance du travail effectué, l’empathie et l’écoute, la création d’un véritable lien social et l’allègement des objectifs.
Reconnaître
le travail effectué et remercier.
La reconnaissance du travail effectué lors de la crise sanitaire peut paraître
évidente de prime abord. Toutefois, il est bon de rappeler que le leader de
l’équipe de gestion de crise se doit de le préciser. Le leader qui ne dit jamais
« merci » ou « bon boulot » est à proscrire.
Faire
preuve d’empathie et être à l’écoute.
A travers cette pandémie mondiale, on s’aperçoit que les sphères privé et
professionnelle sont toutes les deux concernées. Par conséquent, le leader
doit être empathique et à l’écoute aussi bien s’agissant de la vie personnelle
que de la vie professionnelle de ses employés. Toutefois, la difficulté
réside en ce que le leader devra s’enquérir de chacun de ses employés mais sans
s’immiscer dans le cocon familial.
En pratique, le leader doit être capable
de comprendre que les employés peuvent être malades, démotivés, fatigués,
tendus, stressés mais aussi que les employés n’ont pas nécessairement les
moyens et/ou un endroit où travailler correctement. Ne pas prendre en compte
des enfants en bas-âge ou bien le manque de place dans un logement (tel qu’un appartement
parisien) peut être un manque d’empathie.
Créer
du lien avec les membres de votre équipe de gestion de crise. La création de ce lien social peut
passer par l’aménagement de groupes de conversation. Par exemple, des conversations
« machine à café » sur Skype peuvent être créées afin d’entretenir
le dialogue, garder un contact visuel (à travers l’activation de la caméra), vérifier
que l’équipe se porte bien, observer le comportement non verbal. Cela permettra
à vos collaborateurs de bénéficier d’un espace de détente informel assurant
le suivi relationnel de l’équipe de gestion de crise.
Diminuer
ses propres attentes, alléger et déléguer les missions. Il faut retenir qu’en temps de crise,
les collaborateurs sont sans cesse sollicités. Le leader sera donc peut être
amené à être plus flexible et confier des missions avec des objectifs moins
importants qu’en temps normal, à alléger les charges de travail et/ou déléguer
les missions. Ne soyez pas ce donneur d’ordre qui n’a que faire de ses
collaborateurs et ordonne impunément de faire telle ou telle mission en un
temps record !
En outre, les collaborateurs doivent veiller à entretenir une vie saine. Manger correctement et de manière équilibrée, entretenir son corps et son esprit via des activités sportives, culturelles, en somme des activités de loisirs. Enfin, il est primordial de prévoir des suppléants aux membres permanents de l’équipe de gestion de crise. Cela permettra d’organiser des bordées, de pouvoir être absent, en sachant que quelqu’un prend le relais.
Si la résilience de l’entreprise repose
sur la présence de quelques hommes ou femmes, alors elle est faible, une
redondance doit être possible, sur tous les rôles. Cette idée ressort directement des
plans de crise qui prévoient naturellement cette idée de suppléant aux membres
permanents afin d’assurer de manière continue la gestion de la crise.
Globalement, l’ensemble de ces conseils peuvent
être regroupé sous un seul et même mantra : être humain et bienveillant
envers vos équipes de gestion de crise.
« La conjugaison de nos trois
métiers peut permettre à des sociétés victimes de campagne de diffamation de
rétablir le plus rapidement possible leur image et la perception que le public
et les dirigeants peuvent avoir de leur produits et services » Virginie
Bensoussan.
Aujourd’hui, ce qui est sidérant, dans notre
société, c’est la rapidité de diffusion de l’information. Information étant un mot presque trop élégant pour décrire la
cacophonie « des informations » en général et en particulier sur le
web, un média que l’on pourrait facilement s’amuser à définir par
« beaucoup de bruit pour rien » ! Sauf que ce n’est pas pour rien, car l’impact de ce
bruit est rapide et parfois meurtrier… Au moins pour la réputation de
certaines personnes ou organisations, visées à juste titre ou par pure
médisance. Encouragées par l’anonymat qu’offrent les différents supports
d’expression en ligne, les internautes en capacité de s’exprimer sur tout et tout
le monde se sont multipliés de manière exponentielle ces dernières années. Cet
environnement est donc plus que propice à des attaques portant atteinte à
l’image, la réputation et, finalement la vie des personnes.
C’est dans ce contexte que sont nées les
activités de nettoyage d’E-Réputation, car l’image que l’on donne sur le net est
devenue un enjeu majeur qu’il convient de maîtriser. Stéphane Alaux, Emmanuelle Hervé et Virginie Bensoussan-Brulé sont des experts du domaine, chacun dans
leur spécialité et, à eux trois, ils décident de constituer une task force au service de leurs clients.
Afin de préserver l’image de ceux-ci, ces trois experts s’allient aujourd’hui
pour le meilleur résultat, en mettant en commun leurs compétences. Qui sont les
personnes susceptibles d’être soutenues – voire « sauvées » – par
ce groupe d’intervention ? Ce sont les personnalités publiques, les
dirigeants de PME ou les entreprises du CAC40…. Les 3 intervenants peuvent répondre
à l’ensemble des problématiques liées à la réputation et surtout, ils savent se
mobiliser instantanément, pour faire face à une crise avérée et urgente.
Emmanuelle Hervé, spécialiste de la communication et
gestion de crise intervient avant, pendant et après la crise. Une fois les
propos diffusés et la crise déclarée, c’est l’expertise de l’avocate Virginie
Bensoussan qui entre en jeu afin d’identifier une action judicaire.
Mais son action vient également en appui direct de la communication. L’avocate
sera ainsi en mesure d’encadrer juridiquement les plans de communication de
crises pour éviter que ceux-ci ne soient sujets à des actions en justice pour
diverses raisons, par exemple des éléments de langages qui contiendraient des
propos pouvant être considérés comme diffamatoires.
Si l’action judiciaire permettant de
supprimer les contenus offensants ou diffamatoires n’est pas suffisante, c’est
le savoir-faire de Stéphane Alaux qui est sur le devant de la scène. Selon lui, « l’identité
numérique est primordiale pour une entreprise » et malheureusement, la
prise de conscience de cette problématique n’est pas encore assez vive en
France. En attendant le réveil des
consciences, il se chargera de nettoyer l’Internet de toutes les traces pouvant
entacher l’image d’une personnalité publique ou privée, dans le cadre de la
campagne lancée par la task force. Stéphane Alaux intervient via sa société
Net’Wash, dont il est le
dirigeant-fondateur et qui agit sur le Net depuis plus de 20 ans maintenant. Grâce au logiciel Viginet, développé en
interne, l’entreprise est capable de surveiller en temps réel le search, ce qui permet d’être
immédiatement informé de toute parution suspecte sur le client et d’agir
immédiatement en influençant positivement (Principe de la balance) des moteurs
de recherche comme Google.
Ces trois experts aux différents parcours,
s’unissent avec la même idée en tête : préserver au maximum l’image de
leur client pour assurer ainsi la continuité de leurs activités. En effet, leurs
expertises sont distinctes, complémentaires et chacune aussi nécessaire pour la
réussite du résultat attendu par le client.
La mini bio
d’Emmanuelle Hervé et son portrait en quelques questions
Ingénieure de
formation, elle commence sa carrière en Inde puis rejoins le groupe de chimie
américain DuPont de Nemours, pour
développer le marché MENA. A son retour en France en 2005, elle approche le
métier de consultant en gestion de crise qu’elle adopte depuis 2008. Elle a
fondé et dirige le cabinet EH&A
Consulting, spécialisé dans la gestion de crise.
Le cabinet
accompagne les organisations publiques et privées dans la gestion et la
communication avant, pendant et après une crise, afin de préserver la pérennité
de l’activité économique de ses clients, la réputation des marques et des
dirigeants.
Pourquoi choisir cette carrière qu’est-ce qu’elle vous
apporte sur le plan personnel ?
EH : Je suis ingénieure et j’ai passé 15 ans à
pratiquer ce métier dans une société américaine de chimie en sillonnant le
monde, mais je passais ma vie dans les avions… Vers 2008 j’ai voulu me poser et
me suis naturellement tourné vers mon histoire familiale, en effet je suis née
dans la « gestion de crise » car ma mère avait créé une des premières
agences indépendantes françaises de gestion de crise, spécialisée dans l’environnement
et la santé, pour la pétrochimie et le secteur pharmaceutique.
J’ai donc intégré l’agence et appris le métier sur le
tas !
A titre personnel, c’est un métier très gratifiant,
car on rencontre les gens sans faux semblant, le temps de la crise n’est plus
celui des masques et de vraies amitiés naissent des moments passés ensembles. Certes
mes clients sont stressés et parfois pas commodes, mais on est sur de vrais
enjeux, de survie de la société, de la réputation de la marque, du job du
dirigeant et c’est un challenge hyper motivant.
Comment définissez-vous la gestion de crise et la
E-réputation ?
EH : C’est un métier qui vient du domaine
militaire ; elle a ensuite été développée pour le civil et notamment pour
l’industrie de la pétrochimie par Charles Edelman aux Etats-Unis. En effet le
pétrole est une activité dans laquelle l’accident industriel est à la fois
probable et très impactant d’un point de vue humain et environnemental, de plus
les enjeux financiers liés aux cotations en bourse des acteurs majeurs ont très
tôt obligé cette industrie à intégrer la gestion de crise et la gestion de la
communication de la crise comme un savoir-faire essentiel à leur survie.
Aujourd’hui la gestion de la crise va couvrir
absolument tous les secteurs d’activité, public ou privé et ceci à cause de 2
facteurs principaux une judiciarisation immédiate et la caisse de résonnance
des réseaux sociaux.
Deux phénomènes ont amené les entreprises à prendre
conscience des risques liés à leur réputation. La première est l’arrivée de l’Internet
et surtout à partir de 2013, lorsqu’il est devenu conversationnel. Soudainement,
tout ce qui pouvait rester sous le tapis, pouvait être mis à jour et diffusé
largement jusqu’à atteindre les médias classiques. Avec Wikileaks et les révélations de Snowden, une autre étape a encore été passée : celle du
changement culturel, où tout un chacun s’est senti légitime pour devenir un
lanceur d’alerte.
Un autre changement majeur qui nous amené à adapter
notre métier à un monde très juridique : la crise des subprimes en 2008,
qui a conduit de nombreuses entreprises à fermer. Il a alors fallu gérer en
particulier la fermeture des sites industriels, avec tous les risques que cela
suppose : séquestration, destruction de matériel, chantage. Les Plans de Sauvegarde
pour l’Emploi sont aussi devenus un sujet de gestion de crise.
Sur la E-réputation en particulier, là aussi on voit
un changement, qui date des années 2013 – 2014. Avant, les crises étaient le
reflet de quelque chose qui s’était passé dans le monde réel. Par la suite, on
a eu à gérer des crises qui n’avaient aucun fondement réel. Il ne s’était rien
passé, pas de défaut produit, pas de pollution, pas de licenciement tout cela
n’était dû qu’à l’existence du web.
Diffamation sur Instagram
Ce phénomène a été accru par l’utilisation massive des
réseaux sociaux. Alors que les premières crises naissaient après un
évènement marquant imputable à la marque, à l’entreprise, ou à son directeur
général, des crises ont vu le jour à la suite d’un simple commentaire publié
sur un réseau social fréquenté. Dans le cas crée un véritable bad buzz avec des
conséquences, humaines, business, réputationnelles réelles. L’affaire a été
compliquée et la marque a mis des semaines à s’en remettre. Ces changements
majeurs ont amené les entreprises à prendre les mesures nécessaires et nos
métiers à se réinventer.
Finalement, le bad buzz peut être à l’origine d’une
crise ou sa conséquence. Bien évidemment, la crise laisse des traces sur
internet et ce sont ces traces qui alimentent la crise d’E-réputation. Dans
notre jargon, nous parlons de « casier médiatique » et les conséquences
sont particulièrement graves pour une entreprise. Le droit à l’oubli ne
fonctionne pas bien ! Un buzz peut naître en août 2020 et la société sera
en liquidation judiciaire en août 2021 car la majorité de ses ventes se fait
via internet. Il faut donc s’y préparer et s’armer.
A quels stades de la crise intervenez-vous et dans
quelles mesures vos métiers à tous 3 sont-ils complémentaires ?
EH : Nous intervenons tout d’abord « en temps de paix »
, à ce stade ce sont plutôt des entreprises d’une grande taille, voire des
multinationales cotées qui ont besoin de s’armer, de s’organiser à
l’éventualité d’une crise. On va écrire un plan de crise, former les membres de
la cellule de crise et entrainer l’entreprise par des exercices de simulation.
L’autre
type d’intervention est « à chaud ». Il y a des crises à cinétique
lente ou rapide. La cinétique rapide, c’est l’explosion. Mais le plus souvent
les cinétiques sont plus lentes : on sait qu’une chose peut sortir mais on
ne sait pas où et quand. Par exemple, si vous avez Elise Lucet ou L214 tournent
autour de votre activité.
Nous
intervenons auprès de la direction générale et de son comité de direction pour
faire face aux conséquences d’un retrait produit, d’un fait de corruption, d’un
chantage, d’un bad buzz, d’une violence au sein de l’entreprise, d’un attentat
etc.
Dans le
cas où l’entreprise n’est pas armée d’une cellule de crise, nous allons prendre
en main les premières actions et dérouler la méthode de gestion de crise afin
d’en déduire la meilleure stratégie de réponse à la crise, que nous déclinerons
par une tactique de communication de crise vers les parties prenantes de
l’entreprise.
Enfin
nous intervenons également pour accompagner les procédures collectives, PSE, RJ
et fermeture de site industriels.
Nos 3 approches sont complémentaires car, même si la
gestion de crise donne la méthode qui permet au plus près de combattre les
impacts de la crise, et de coordonner les corps de métier, il sera nécessaire
de faire intervenir un avocat pour se défendre des attaques juridiques
possibles (plaintes des clients, compliance RGPD, respects des contrats
commerciaux, diffamation). Enfin la crise va laisser derrière elle un
« casier médiatique », qui peut être extrêmement nuisibles aux
personnes physiques et à la marque, il conviendra donc de
« nettoyer ».
L’accroissement
des outils numériques et la massification des échanges est un fait. Quelle
influence sur vos métiers ?
E.H : Rien ne disparaît
vraiment, chaque occurrence peut être retrouvée… Ce sont donc les suites de
crise (justifiée ou non) qui sont difficile à appréhender et qui demandent donc
des outils supplémentaires pour soutenir nos clients. En effet, comment peut-on
s’en sortir quand on est dans le cas où l’on a été condamné, que l’on a purgé
sa peine et qu’on recherche un travail… Trop facile de trouver les antécédents !
Avant, l’employeur se fiait plus à la réalité du moment et à la personne qu’il
avait en face. Si vraiment, ensuite, il avait un doute, il lui fallait aller
dans les archives des journaux pour vérifier des infos. Aujourd’hui, il a déjà
tout sous la main avant d’avoir vu la personne…
Le
phénomène et le danger est augmenté par le fait que nombre de dirigeants
d’entreprise ou personnalités politiques ont une mauvaise compréhension du web
conversationnel, le néglige ou en ont peur, ou les deux.
Pouvez-vous
nous donner un exemple de crise bien gérée et 5 conseils pour prévenir ou
endiguer une crise ?
Les crises bien gérées ont ceci en commun qu’elles ont
été identifiées à temps et que l’entreprise à fait montre de transparence et
d’empathie à tous les stades.
Commençons par ne pas aggraver la crise et ne pas
tomber dans ce que j’appelle les 7 péchés capitaux : la tactique du bouc
émissaire, les abonnés absents (no comment), l’arrogance, la stratégie du
contre feu, la globalisation, la victimisation et la réponse juridique.
La stratégie juridique est indispensable mais ce n’est
pas une stratégie de communication. La réaction de l’entreprise ne doit jamais
être établie dans un langage juridique par des avocats car elle apparaît
toujours comme défensive, donc agressive et il ne faut jamais commencer par
attaquer. La stratégie juridique et la stratégie de communication doivent être
alignées pour ne pas se contredire… C’est là où notre action est importante
car très (trop) souvent communiquant et juriste ne sont pas d’accord, n’ayant
pas les mêmes enjeux, pas le même temps…En revanche, intégrer une stratégie
juridique est indispensable car on doit regarder la crise au travers de ce
prisme : il faut se demander quelles sont nos obligations, quels sont les
risques juridiques, ce qui peut se passer par la suite, y a-t-il une
jurisprudence….
La mini bio de
Stéphane Alaux et son portrait en quelques questions
Véritable
autodidacte au parcours varié allant de la cuisine à la communication en
passant par le droit et l’économie, Stéphane
Alaux s’est intéressé au web dès son avènement, alors qu’il était en
Angleterre. Il est ainsi devenu un spécialiste de ce nouvel univers et vite précurseur
sur les solutions visant à protéger et défendre les entrepreneurs sur le web. Emettant
des avis tranchés sur le sujet d’un web à la marge depuis l’avènement du web
2.0 (ou web conversationnel) il avoue faire passer l’intérêt des entreprises
avant le respect de cette pseudo éthique
qui, pour lui, n’existe pas… Il est
spécialisé depuis 20 ans en identité numérique, search marketing et business
digital.
Spécialiste avéré
du référencement sur Internet, il dirige depuis 2012 la société Net’Wash, qu’il
a fondée et se positionne dans la durée comme le leader dans le domaine de la E-réputation
en France.
Stéphane Alaux :
Quand intervenez-vous en cas de crise
E-réputationnelle ?
Dans la
mesure où les actions de prévention, très importantes, ne sont que très
rarement mises en place, nous intervenons le plus souvent en bout de course,
pour gérer les traces numériques. Nous éteignons les feux…
Une crise
d’E-réputation est une perte de contrôle de son image, avec un déséquilibre
entre ce que je dis de moi et ce que l’on dit de moi. On connaissait déjà ça dans
la vraie vie, mais là on parle d’Internet, ce fameux continent du « tout
est possible » et surtout du « tout restera chez moi »…. Je
considère qu’on peut parler de crise à partir du moment où en première page de
Google, la proportion de ce que disent les autres sur moi est plus importante
que je dis sur moi. Lorsque la crise est d’une ampleur internationale, l’information
est diffusée en volume considérable. Il est possible que l’on puisse tenter de
maîtriser cela de manière préventive, mais c’est bien rare et c’est donc le
plus souvent à posteriori que les
actions commencent…
Il a
seulement 2 options. Soit le problème existe vraiment et donc les traces
numériques sont inévitables, soit le problème n’existe pas mais il a été
inventé pour être posté sur Internet et là c’est encore pire, puisque
l’intention elle-même est mauvaise…. La massification des médias digitaux ne
fait qu’accroître l’ampleur d’une telle crise et les premières répercussions
sont immédiates.
La
société Net’Wash intervient à ce stade et je dois dire que près de 95% du
chiffre d’affaires de notre société se fait lorsque la crise est passée. A mon
grand dam, car je sais qu’en faisant de la prévention et des actions en amont,
on pourrait grandement limiter les dégâts… Mais l’insouciance règne encore au
joli pays d’Internet et la chute est très dure. Notre job est de maîtriser rapidement les
conséquences et, dans la mesure du possible, essayer de contrarier le courant
des événements…
Comment la E-réputation est gérée aux USA ?
Les américains sont extrêmes
procéduriers, ils ont une gestion très différente de la nôtre. Si vous dites du
mal de quelqu’un, on va vous demander des millions de dollars de dommages et
intérêts… En France, ce sera 500 ou 1000 €, parce que la diffamation n’est
pas prise au sérieux. Le droit Français et Européen n’est pas vraiment adapté à
ces nouveaux comportements. Pour avoir du poids et faire respecter la E-réputation
de son entreprise, il n’y a pas vraiment d’outils. Nous sommes aussi victimes
de ce que j’appellerais l’esprit latin : on est capable de marcher avec un
caillou dans la chaussure. Les entreprises continuent de fonctionner malgré une
mauvaise image, elles ne sont pas affolées.
L’esprit américain peut s’étendre à
tous les Anglo-Saxons, qui prennent l’E-réputation très au sérieux, comme la
« réputation » tout court… En France, malheureusement, les
entreprises ne prennent pas conscience qu’il est aujourd’hui incontournable, voire
de l’ordre de la survie, de maîtriser et contrôler leur image sur internet.
Lorsqu’on parle d’investir dans l’E-réputation, le responsable digital est
méfiant. On lui alloue un budget pour une mission précise (qu’il a souvent
lui-même planifiée et soumise à sa direction) et cette mission ne comprend pas
de poste E-réputation. De fait, ajouter une charge supplémentaire au budget
initial n’est pas possible. S’il veut vraiment ajouter ce volet aux autres
postes de sa mission, il devra amputer son budget initial. Il est donc réticent
et a tendance à mettre l’E-réputation de côté. Par ailleurs ses enjeux ne sont
pas les mêmes que ceux du dirigeant. Avec le développement du digital, il
pourra très facilement changer d’entreprise, en cas de problème. Le dirigeant subira
quant à lui de plein fouet les conséquences de son inconséquence !!! Celui
qui a tendance à déléguer la E-réputation doit véritablement s’en saisir, car
il est directement concerné par cette problématique. Comme les Relations presse
hors produit, la E-réputation devrait prioritairement être validée par le
dirigeant et non s’arrêter aux services communication, marketing ou digital…
Car lorsque la crise est là, c’est le dirigeant qui paie le prix fort de la
chute de chiffre d’affaires, pouvant aller jusqu’à la faillite.
Par ailleurs, certaines entreprises
continuent d’investir massivement dans des campagnes de pub télé alors même que
leur réputation est catastrophique. Elles assistent à un véritable déséquilibre
entre l’investissement et le retour sur investissement. Pour moi,
l’E-réputation est la réponse à cet écart. Aujourd’hui les gens se ruent sur
internet et l’identité numérique est primordiale pour une entreprise. Il faut
comprendre qu’une crise, même bien gérée, continuera sur le Web ; si
aucune mesure n’est prise, l’entreprise peut courir à sa perte.
Quels sont les outils dont
vous disposer pour prévenir, surveiller et contrôler l’E-réputation d’une
entreprise ?
Nous
avons créé notre propre outil « Viginet ». Développé en interne sur la
base des besoins bien connus du fait de notre expérience, nous l’avons
construit pour surveiller le search* en temps réel. Nous avons également une
base de données énorme nous permettant de trouver des informations qui ne sont
pas encore annexées sur Google ; nous allons chercher des informations
dans des forums avant que Google ne les ait annexées ; cette action peut prendre quelques jours mais
elle permet de trouver beaucoup plus rapidement des éléments recherchés, cette
base de données étant en constante évolution. L’objectif est principalement d’avoir
un outil de surveillance efficace pour surveiller le positif et le négatif sur
les mots clés que l’on va rentrer sur ce logiciel. Bien sûr, nous utilisons
aussi « SEMrush », mais cet outil du marché, extrêmement performant mais global
nous propose 80% d’éléments que nous n’utilisons pas. Nous ciblons nos actions
et c’est pourquoi nous avons préféré bâtir notre outil, qui correspond
exactement à nos attentes.
*Ce qu’on trouve sur Google.fr en fonction des mots clés. Le
résultat étant appelé Search Engine Results Page.
Comment s’articule
l’intérêt du consommateur et la nécessité de préserver l’image d’un client ?
Notre
mission est d’aider le client à préserver son espace de travail. On ne cache
pas la vérité et il n’y a aucune forme d’obligation : l’intérêt du
consommateur dépend de ce qu’il recherche. Nous souhaitons simplement que l’entreprise qui se met en
scène commercialement sur le web puisse maîtriser cet espace qu’est sa « première
page ». Nous travaillons à accompagner l’entreprise, dans son intérêt.
A quels stades de la crise intervenez-vous et
dans quelles mesures vos métiers à tous 3 sont-ils complémentaires?
Nous sommes contactés une fois que la crise est déclenchée.
C’est très long de nettoyer le search, notre métier ayant une certaine inertie.
En revanche notre intervention sur les Google news est différente. Le
traitement, l’ensevelissement et la récupération de l’image n’est pas le même.
Pour y parvenir il faut utiliser des surfaces accréditées Google news. On peut
donc intervenir au même moment qu’Emmanuelle et Virginie, mais ce sont elles
qui nous donne le tempo et qui déclenchent l’action.
Pour le search, ce sera plus long, cela peut durer des mois.
Il est extrêmement facile de dire du mal en publiant. Lorsqu’il n’y a pas eu de
construction de digues digitales, il
faut bloquer le contenu négatif ou diffamatoire en imposant un autre contenu
positif. On arrive ainsi à faire autorité sur les 10 premiers résultats et même
les 2 premières pages. Dans ce cas le travail est plus compliqué…
L’accroissement
des outils numériques et la massification des échanges viennent elles compliquer
votre métier ?
On ne peut intervenir sur les réseaux sociaux, ce sera le
travail du juriste. Les RS n’ont pas forcément d’impact sur notre métier de
base. Ce qui est nouveau, c’est que tout le monde est un communicant en force
(et croit réellement l’être), c’est donc un véritable souci, d’autant que l’anonymat
est quasiment imposé. On parle des réseaux sociaux, mais n’importe quelle
surface de communication donnant des avis (quechoisir.fr) peut être une véritable catastrophe pour la
marque.
Est-il possible de restaurer complètement une réputation
entachée ?
Sur les deux premières pages de Google, oui. Un internaute
qui cherche le nom du dirigeant de la marque incriminée et l’évocation de
l’affaire qui le concerne, trouvera l’information, ailleurs. Mais naturellement
et en début de recherche, il trouvera seulement les informations basiques et
neutres ou positives sur le sujet. Notre métier ne consiste pas à supprimer ou
maitriser la totalité de l’information dans Google. Nous agissons en sorte que
la première page d’une entreprise sur Google, qui est un espace de travail,
soit vierge d’élément négatif. Notre action est importante pour préserver l’avenir
d’une entreprise et s’assurer qu’elle puisse continuer à fonctionner, pour sa
santé financière, la sauvegarde de ses équipes et la pérennité de ses
activités.
La mini bio de Virginie
Bensoussan Brulé et son portrait en quelques questions :
Avocate à la Cour
d’appel depuis 2006, Virginie dirige le pôle contentieux numérique au sein du
cabinet Lexing Alain Bensoussan Avocats, qu’elle
a rejoint en 2006.
Ses domaines de
prédilection sont le conseil et le contentieux en droit de la presse, en droit
pénal du numérique et de l’informatique, en contentieux de l’Internet et en
contentieux Informatique et libertés et bien sûr, ses spécialités sont au cœur
des préoccupations liées aux atteintes à la e-réputation et aux litiges
internet de toutes natures. Elle a été nommée Best Lawyer dans la catégorie Information
Technology Law de l’édition 2019 du classement de la revue américaine Best Lawyers.
Mes
2 parents sont avocats et notre cabinet est familial puisque je l’ai intégré il
y a 14 ans et que mon frère Jérémy nous a rejoints à la fin de ses études
d’ingénieur, il y a 6 ans… Nous avons un peu « élargi » la
famille, avec aujourd’hui 80 avocats et des
actions sur les 5 continents.
En quoi la maîtrise de la E réputation
est-elle primordiale ?
Au
sens juridique, le terme réputation s’applique
aux personnes physiques ; sur le web on parlera plutôt d’atteinte à la considération professionnelle pour
les personnes physiques et, pour les produits ou services, il s’agit de critique de produits ou services et on
parle de dénigrement.
Les entreprises et les dirigeants doivent absolument
savoir ce qui se dit sur eux et sur leurs produits. Du fait de la rapidité de
propagation de l’information sur Internet et également de sa durabilité, c’est
grave. Ce genre d’incident peut créer un climat de défiance de la part des
collaborateurs, mais aussi des clients, des autorités de tutelles, etc… Ils
doivent donc être vigilants et prendre les mesures nécessaires, qu’elles soient
judiciaires ou non, pour rétablir leur image vis-à-vis du public. Dans le cadre
d’une atteinte à la réputation, il n’y a que 3 mois pour agir en judiciaire, à
compter de la première mise en ligne de propos injurieux ou diffamatoire. Pour
le dénigrement, on a 5 ans. Pour les délits de presse, il y a également 3 petits
mois pour agir. Cela nécessite que les entreprises mènent des actions de veille
et que, en cas d’incident, elles choisissent les actions à mettre en place :
cela peut être de ne rien faire, mais elles peuvent aussi tenter de neutraliser
le contenu par l’action d’une agence d’E reputation comme Net Wash ou tenter
d’obtenir le déréférencement… Il faut aussi identifier la personne à
l’origine des propos diffamatoires et il faut bien savoir que, dans la grande
majorité des cas, l’auteur sera soit un salarié ou un ancien salarié, soit concurrent.
Sur un plan judiciaire, on s’adresse aux Prud’hommes
quand c’est un salarié et au Tribunal de
commerce pour le concurrent déloyal.
Au sein de la Task Force, comment interviendrez-vous ?
L’intérêt
de cette alliance de 3 expertises, c’est que les entreprises, les personnes ou
les organisations qui rencontrent un problème de cette nature vont entrer dans
le sujet par l’une de nos 3 structures. Chacun d’entre nous ayant l’exacte
connaissance de l’activité des autres va savoir qui contacter en priorité. Pour
ma part, si mon cabinet est contacté directement, je vais intervenir une fois
que les propos ont été diffusés et que leur impact négatif s’amplifie. Je vais d’abord
identifier une action judiciaire et voir si elle est opportune et faisable. Si
ce n’est pas le cas, je conseillerai le client et l’orienterai vers l’agence de
E-réputation pour tenter d’enfouir les contenus. Si l’action judiciaire et primordiale
et opportune, je vais poursuivre en justice et demander des réparations
pour préjudice moral.
Si la campagne de dénigrement devient diffamatoire
au point de créer une situation critique, je vais accompagner les clients et
leur conseiller une agence de communication de crise pour valider des plans
médias, en communication interne entreprise et à l’externe envers les médias,
réseaux sociaux, etc. Des scripts seront formatés pour les services clients. En
coopération avec l’agence de communication de crise, je valide le contenu des
messages publiés par l’agence, afin d’éviter qu’à son tour la réponse ne soit
pas elle-même porteuse de messages potentiellement dénigrants. Il ne faut pas évidemment,
que la communication de crise se retourne contre le client.
En amont, j’accompagne nos clients pour former leurs
collaborateurs ou agents à respecter la loi quand ils s’expriment au nom de
leur entreprise, ou à titre personnel mais en évoquant leur vie professionnelle
sur un réseau social ou lors de n’importe quel type de communication impliquant
l’identité de l’entreprise.
En quoi cette coopération
tripartite est-elle plus efficace pour les clients ?
Dans les situations les plus complexes et graves sur
le plan réputationnel, la conjugaison de nos 3 expertises peut permettre aux
sociétés victimes de campagnes de diffamation ou dénigrement de rétablir rapidement et durablement l’opinion publique
sur leurs dirigeants et leurs produits et services. Ce qui compte, c’est de rétablir
l’image de la marque, de la structure et de ses dirigeants dans l’esprit du
public, au sens large. Si je pense aux banques, par exemple, leur autorité de
tutelle est la CPR à qui ils rendent des comptes et ils ne peuvent donc
absolument pas se permettre de ternir leur réputation.
On se trouve démuni face à ce type de comportement,
mais il est assez facile d’identifier les auteurs des propos diffamatoires quand
ce sont des salariés ou des concurrents, car ils ne savent pas très bien se
cacher… Il est donc assez facile
d’intervenir et obtenir réparation par la justice civile ou pénale.
Je
souhaite ajouter un point que je trouve très important, car mal appréhendé par
le public, c’est la relation légale avec les plateformes américaines (FB,
Twitter etc..). C’est important car tout le monde les utilise !! Elles
coopèrent avec la justice française, sous réserve toutefois qu’on aille au-delà
de la simple mise en demeure. Mais, dans le cas où des contenus diffamatoires
sont postés sur leur plateforme, elles exécutent, sous certaines conditions
bien sûr, les décisions de justice qui sont rendues à leur encontre, même
étrangères.
Emmanuelle Hervé a été invitée par le capitaine de frégate Raphaël Fachinetti, Directeur du Centre d’expertises pratiques de lutte antipollution, à participer à un exercice de simulation de crise organisé par la Préfecture maritime de la Méditerranée dans le cadre du dispositif ORSEC maritime, le 17 septembre 2020.
Sur les pas du Capitaine de Frégate Raphaël Fachinetti
Raphaël Fachinetti entre en 1989 à l’École Navale qu’il rejoint après une préparation effectuée au lycée Champollion de Grenoble. Au cours de sa carrière, il a participé à la lutte contre la pêche illégale aux îles Kerguelen, mais également contre le trafic de cocaïne aux Antilles ou encore contre la piraterie autour de la zone du canal de Panama. En 2008, Raphaël Fachinetti a pris part aux opérations de libérations des 30 otages du voilier Le Ponant. En 2010, il participe aux secours et au ravitaillement du peuple haïtien suite au tremblement de terre.
Le capitaine de frégate prend le commandement, le 10 août 2013 du navire hydro-océanique Beautemps-Beaupré jusqu’en 2015. Durant 1 an, de 2015 à 2016 il est nommé chef de la division « chantiers navals » où il assure le suivi des constructions des nouvelles unités de la marine. De 2016 à 2018, il est en charge du centre de conduite des opérations et du centre de crise au sein de l’état-major du commandant en chef pour la zone maritime atlantique. Depuis 2 ans, Raphaël Fachinetti dirige le Centre d’Expertises Pratique de la lutte antipollution (CEPPOL).
Quel est le rôle du CEPPOL ?
Le CEPPOL est une unité de la Marine nationale créée par instruction ministérielle le 9 janvier 1979 à la suite de la pollution majeure ayant touché la Bretagne en mars 1978 causée par le naufrage de l’Amocco Cadiz. Basé à Brest, le CEPPOL agit comme expert au profit de l’ensemble de la Marine, en métropole comme outre-mer dans le domaine de l’assistance aux navires en difficulté et dans la lutte contre les pollutions maritimes (par hydrocarbures, substances nocives et potentiellement dangereuses, conteneurs etc.) Concrètement, le CEPPOL est chargé de préparer la Marine nationale à ses responsabilités environnementales et d’apporter soutien et expertise aux autorités maritimes et responsables opérationnels dans les opérations de lutte contre la pollution.
Quel est le rôle de la Marine nationale ?
La lutte contre les pollutions en mer est une mission confiée au ministère des Armées par instruction du premier ministre. Cette responsabilité incombe principalement à la Marine nationale. Pour mener à bien ce type de mission, la marine nationale affrète des remorqueurs d’intervention et des navires spécialisés, elle forme à la lutte antipollution plus de 150 marins par an qui embarquent sur les bâtiments, flottilles aériennes et unités capables de participer aux opérations. Elle dispose de différents matériels destinés à équipes ses bâtiments mais également les bateaux des professionnels de la mer qui la rejoindraient pour lutter contre une pollution : moyens d’allégement, de confinement, de récupération ainsi que de traitements chimiques.
Retour sur l’exercice de simulation de crise Polmar
L’exercice nommé « PANGOLIN » était organisé par la Préfecture maritime de la Méditerranée, dans le cadre du dispositif ORSEC maritime qui applique des principes d’organisation similaires à ceux mis en œuvre à terre. Le dispositif ORSEC (Organisation de la Réponse de Sécurité Civile) est un programme d’organisation des secours en cas de catastrophe à l’échelon départemental. Il permet une mise en œuvre rapide et efficace de tous les moyens nécessaires sous l’autorité du préfet. Le préfet maritime est directeur des opérations de secours (DOS) ; il s’appuie sur un centre de traitement crise (CTC) organisé en modules adaptés à la situation : communication institutionnelle, expertise et planification stratégique, anticipation, logistique, interface avec les autorités ou administrations terrestre, judiciaire…
Emmanuelle Hervé a plus particulièrement suivi les cellules « communication » et « expertise » avec de nombreux experts spécialisés comme le CEPPOL, le Centre de Documentation, de Recherche et d’Expérimentation sur les pollutions accidentelles des eaux (CEDRE), les Marins Pompiers de Toulon, le laboratoire d’analyse, de surveillance, et d’expertise de la marine (LASEM), la gendarmerie maritime, la société Les Abeilles, le Bataillon de Marins-Pompiers de Marseille etc.
Le scénario de l’exercice était le suivant : un porte-conteneurs nommé « Pangolin » est en transit au large de l’Italie, situé en face de Monaco. Un incendie se déclare à bord. Le navire perd le contrôle et heurte un rocher, il s’échoue et coule en mer. L’équipage est secouru mais du fuel lourd de propulsion s’échappe du navire et va former trois nappes d’hydrocarbures qui menacent de se déverser sur les côtes françaises. Dans le cadre de l’exercice et compte tenu du fait que tous les marins du « Pangolin » étaient considérés comme saufs, la priorité fixée par le directeur des opérations de secours au centre de traitement de crise était la récupération d’un maximum de fuel avant qu’il n’atteigne les côtes françaises.
L’objectif principal de cet exercice est
d’entraîner les différents acteurs de l’État, partenaires publics et privés, à
coordonner leurs actions lors d’une crise maritime complexe. Il s’agit de
rassembler les moyens capables d’agir, d’attribuer à chacun une tâche,
d’assurer le soutien et la logistique afin de mener à bien ces tâches, tout
cela en balayant toutes les problématiques, en assurant la sécurité des acteurs
et en préservant l’environnement. Il a également permis d’intégrer à la gestion
de crise, les problématiques et contraintes de l’interface terre-mer lors d’une
opération de lutte contre une pollution maritime.
Après un exercice de simulation de
crise, il est primordial de faire un RETEX (retour d’expérience) qui permet
d’analyser méthodiquement et rigoureusement l’exercice et son organisation. Le
RETEX a pour but de déterminer les points forts et
les axes d’amélioration pour pérenniser les forces et combler les faiblesses. Il s’agit de reconnaitre le
travail de chacun, les compétences des participants pendant l’exercice et de
garder une trace écrite de tous ces enseignements pour qu’elle puisse être
utilisée hors exercice lors d’une véritable crise.
Emmanuelle Hervé a endossé le rôle d’observateur et a relevé un certain nombre d’éléments sur lesquelles capitaliser : identifier et communiquer de façon proactive envers les différentes partie-prenantes, rappeler le positionnement de la Marine nationale, accueillir et informer les experts arrivant en aval de la constitution de la cellule de crise, posséder une ligne de téléphone fixe en salle expert, rédiger en amont, les messages d’attente, etc. Ces éléments sont en lien direct avec l’exercice mené par la Marine nationale mais peuvent également être pris en compte pour tout autre exercice nécessitant une mobilisation en cellule de crise. Il est toujours utile de bien identifier les parties-prenantes et de rédiger des messages d’attente en amont, pour faciliter la communication pendant la phase d’exercice.
Nous tenons à remercier la
Marine nationale et le capitaine de frégate Raphaël Fachinetti pour leur
invitation à participer à un exercice de crise Polmar très enrichissant. Nous avons eu la chance d’être complètement immergés dans une cellule de crise aux côtés de nombreux experts mettant leurs compétences au service d’une mission commune.
Si vos équipements ont un comportement anormal, répétés dans
un laps de temps court et sur plusieurs systèmes, vous êtes très probablement
sous le coup d’une attaque cyber. Mais généralement, et bien souvent, un beau
texte sur fond noir ou une tête de mort illustrant le commentaire indique que
vous devez payer une rançon pour accéder à vos contenus.
En cas d’attaque, il y a 5 règles élémentaires à exécuter dans un ordre de priorité précis. L’enjeu est de stopper la propagation du malware. Généralement le mal sera déjà fait. Mais vous empêcherez alors le vol de données qui prend du temps. En coupant les liens, les ordinateurs deviennent sourds et muets ce qui les rend par définition intouchables.
La première chose à faire c’est débrancher le câble de connexion à votre routeur télécom pour empêcher le dataleaks. Vous n’aurez plus d’internet. Inutile donc d’activer le partage de connexion avec votre GSM, vous allez aggraver la situation. À ce stade on ne travaille plus et on ne touche plus à rien. Puis débrancher les câbles de chaque serveur pour que la communication entre vos serveurs et vos postes de travail soient coupés.
A ce moment on peut commencer à regarder son plan de crise
et en particulier les critères d’évaluation de l’ouverture d’une cellule de
crise. Se préparer à ouvrir la cellule de crise, avec ses fonctions
habituelles, directeur, coordinateur, historien, com et juridique. On y
associera les experts nécessaires à cette attaque cyber, DSI mais aussi le DRH
et le business.
La seconde étape, c’est prévenir vos salariés de ne plus toucher aux ordinateurs, d’interdire la connexion à distance et de contacter vos partenaires et clients pour annuler vos rendez-vous de la journée. Très important, vous interdisez à vos salariés de communiquer sur la situation. Secret absolu, ceci préservera la stratégie de votre communication de crise et vous permettra de mieux protéger votre marque et votre image.
Comme un secret de ce type ne tient jamais bien longtemps,
on envisagera en réunion de la cellule de crise, tous les scénarios d’évolution
défavorables. Impacts business (allez vous pouvoir produire, vendre,
transporter, servir vos clients ?), financiers (risques qui découlent de
l’impact sur le business mais aussi du risque juridique en particulier RGPD
-l’amende pour rappel est de 4% du chiffre d’affaire- allez vous payer la
rançon ?), juridiques (RGPD mais aussi quid d’un client qui se retourne
contre vous car il croyait benoitement ses dossiers entre des mains amies),
social (vos employés vont prendre une dose de stress, et un sentiment de
frustration non négligeable, sur le long terme on ajoute l’impact sur le talent
retention et sur la marque employeur, qui veut travailler pour Yahoo ?) et
même humain (les pirates peuvent prendre le contrôle sur des systèmes
hydrauliques, sur des vannes et tuer des gens, cela est déjà arrivé).
Comment votre stratégie de gestion de crise va protéger votre image ?
La troisième étape, c’est contacter votre assureur si vous avez une police d’assurance sur le risque Cyber. Si vous n’en avez pas, contactez-le quand même pour engager la procédure de sinistre. Chaque assureur à son protocole. Plus on intervient tôt, plus on a de chance d’être mieux accompagné et couvert.
Une fois les scénarios d’impacts déroulés, conviendra de
commencer à réfléchir aux plans de mitigation, comment limiter la force de
l’impact ? Comment faire baisser la probabilité du scénario ?
La quatrième étape c’est contacter votre partenaire cyber sécurité. Le mieux est de l’avoir identifié. Si vous n’en connaissez pas, utilisez votre réseau. Appelez votre avocat, votre agence de communication, mais pas votre prestataire informatique. Ce n’est pas son métier et il va vouloir improviser pour faire au mieux et vous aider. C’est très dangereux de faire intervenir un technicien sans l’expertise très pointue et sensible qu’exige la gestion technique d’une attaque cyber. Ne vous précipitez pas, attendez de le trouver, c’est lui qui pilotera votre partenaire informatique pour obtenir les informations dont il a besoin pour comprendre comment fonctionne votre organisation.
Maintenant il faut parler en interne, comment raconter
l’histoire ? Eviter la recherche du bouc émissaire, la panique (données de
marché confidentielles, dossiers classés SD, photos privées.. tout ce qui était
sur un terminal peut se retrouver dans la nature) ? Il faut se préparer à
vivre de longues semaines sans un accès complet à l’environnement de travail
habituel (vos mails, vos datas, etc..)
Enfin, la dernière étape, enclenchée dans l’heure de l’attaque, c’est prévenir votre avocat. Mais pas votre avocat d’affaires. Votre avocat spécialiste de l’enjeu cyber. Celui qui gérera avec votre communication de crise la relation avec vos clients, vos partenaires et votre image. Ne contournez jamais ces règles. Vous ne ferez que complexifier la situation à tout point de vue.
L’attaque a fuité ? De toute façon vos clients,
partenaires et fournisseurs ont bien remarqué que vos mails ne répondaient plus
et que vous utilisiez des gmails. De toute façon le « milieu » cyber
et certains experts comme Zataz auront bien repéré votre attaque et publié à
son propos. Vient le temps de la com externe, comment ne pas affoler les
marchés si vous êtes cotés en bourse ? Que répondre à la
presse ? Quelle posture va être la meilleure pour sortir grandi de cette
affaire ?
Une attaque cyber, c’est une attaque contre soi. C’est très
perturbant et bouleversant. Personne n’est préparé à cela et cette situation
engendre qu’on le veuille ou non un état de choc, y compris chez certains
salariés. Il faut donc engager une démarche rassurante, expliquer ce qu’il se
passe, ce qu’il va se passer et comment cela va être géré. C’est le meilleur
moyen de protéger la mobilisation des salariés et cela aidera beaucoup l’équipe
de crise qui à du recul, pas d’affect et une objectivité pertinente. Faites
confiance et déléguer, car cette fois-ci, il n’y a que les professionnels qui
pourront vous soutenir.
Nous avons bien guéri de la distorsion des biais cognitifs
avec le Covid, méfions-nous cependant, une attaque cyber n’arrive pas qu’aux
autres, grands ou petits, symbolique ou pas, la question n’est pas de savoir si
cela vous arrivera, mais quand !
Depuis
la mort de Georges Floyd au mois de Mai dernier, afro-américain, asphyxié par
un policier blanc à Minneapolis dans l’État du Minnesota (États-Unis), de
nouvelles manifestations ont été recensées en Amérique mais aussi dans le monde
entier.
En
réaction, certains mouvements ont émergé de nouveau comme celui des Black Lives
Matter, fondé en 2013, et ayant pour objectif de lutter contre les violences
portées à la communauté afro-américaine.
Ce
mouvement est relayé par certaines grandes entreprises comme celle américaine
spécialisée dans la fabrication d’articles de sport, Nike. Cette entreprise a
ainsi indiqué sur twitter, via son message « Ne tournez pas le dos au
racisme », son soutien au mouvement Black Lives Matter.
Reprise
par les entreprises, la bataille contre les violences et le racisme est
omniprésente dans notre société.
Les
incitations au racisme sont cependant monnaie courante, du black face, incarnation
stéréotypée de personnes noires à travers un maquillage, au délit de faciès à
l’embauche. Mais l’entreprise est obligée de réagir fortement sous peine d’être
taxé de laxisme voir de soutien avec ces comportements. Pour preuve on n’oublie
pas, par exemple, le scandale qui a suivi deux employés de la marque Le slip
français, qui s’étaient grimés lors d’une soirée et leur mise à pied immédiate.
Cet
environnement sociétal fait que le contexte est anxiogène et a un impact direct
sur la stratégie marketing de certaines entreprises qui se sentent obligées de
prendre les devants, « de laver plus blanc que blanc » pour surtout
éviter des effets de désengagements du public voir des campagnes de boycott.
C’est
ainsi que le Samedi 27 juin, le groupe de cosmétique annonçait, dans un
communiqué, le retrait des mots « blanc », « blanchissant »
et « clair » de la description de ses produits destinés à « uniformiser »
la peau.
Cependant, l’Oréal ne s’attendait
pas à ce que son communiqué fasse l’objet d’un véritable bad buzz. C’est
pourtant ce qu’il s’est passé sur Twitter avec l’amoncèlement de tweets et de
hashtags.
Cette
décision a été vue par certains comme du racisme antiblanc. Immédiatement, les
internautes ont relayé l’information sur les réseaux sociaux, et les tags ont
commencé à pleuvoir : #jarreteloreal, #boycottloreal.
Pour
d’autres, le communiqué est perçu comme un acte hypocrite. L’Oréal souhaite
lutter contre le racisme pourtant, auparavant, certains de ses actes avaient
été assimilés à du racisme.
Par
exemple, l’Oréal avait été mis en cause, en 2008, pour avoir photoshopé la peau
de la chanteuse Beyoncé afin de la rendre plus blanche, pour une campagne
publicitaire pour ses produits vendus en Afrique.
De
plus, selon des propos tenus par un dirigeant de l’Oréal et recueillis par le
figaro, l’Oréal a décidé d’enlever les termes appelant à la blancheur, mais poursuivra
quand même la vente de ses produits éclaircissants. Le changement ne viserait
que les campagnes de communication et les emballages.
Et la crise de se poursuivre, l’universitaire Mame-Fatou
Niang précise, produit un
tweet qui laisse penser que la stratégie de communication de l’Oréal est
ambiguë voire incompréhensible.
Débats sociétaux et crises numériques
« Le groupe l’Oréal
a décidé de retirer les mots blanc/blanchissant (white/whitening), clair
(fair/fairness, light/lightening) de tous ses produits destinés à uniformiser
la peau ». Ce communiqué qui a entrainé un véritable bad buzz démontre que
le digital permet la diffusion d’une information de manière rapide et ample.
Cela se fait notamment
à travers : l’utilisation d’hashtags, le nombre d’internautes/followers et
l’omniprésence des réseaux sociaux dans notre société. Pour preuve, Visibrain –
plateforme de veille de réseaux sociaux – a recensé 10 fois plus de tweets
qu’en temps normal.
Ce bad buzz rappelle aussi que la discrimination à l’égard de l’identité d’un individu est un sujet des plus critiques. D’ailleurs, en 2018, Sophie Licari – consultante indépendante en communication stratégique – avait souligné que les différentes formes de discrimination et d’atteinte à l’identité restaient de loin l’un des sujets les plus critiques de notre société.
L’appropriation
culturelle en est un exemple. En 2019, Dior en avait fait les frais avec sa
publicité « The new sauvage » mettant en scène l’acteur Johnny Depp
jouant de la guitare dans le désert de l’Utah tandis qu’un amérindien en tenue
traditionnelle exécutait une danse sacrée. Les internautes s’étaient levés et
avaient pointé du doigt l’acte raciste qu’avait commis l’entreprise. Face à la
polémique Dior a décidé de retirer sa campagne.
Outre
la criticité d’un sujet, il faut rajouter que la discrimination est aussi un
sujet clivant. De sorte qu’elle appelle nécessairement deux parties opposées :
les progressistes et les réactionnaires. Dès lors, une action menée dans le
cadre de tels sujets polémiques mettra naturellement en exergue des
discordances sociétales. Les uns approuveront, les autres réfuteront.
La
discrimination identitaire est donc une problématique constante et difficile à
gérer notamment en présence d’antécédents. Dans le cas de l’Oréal,
effectivement, sa gestion d’image sera compliquée du fait qu’elle avait déjà
été épinglée sur internet pour le licenciement de la mannequin Munroe Bergdorf.
Cette dernière avait dénoncé le racisme des personnes blanches dans un post
Facebook en 2017. S’ajoute à cela, maintenant, le bad buzz de l’Oréal avec son
communiqué du 27 juin.
Dès
lors, les entreprises doivent porter une attention particulière quant à leur
stratégie de communication. Il semble que la meilleure des positions à prendre
est celle de la cohérence et de l’anthenticité.
La rencontre insolite avec les équipes gestion de crise du Groupe Teleperformance
La crise actuelle met en péril l’économie mondiale. Toutes les entreprises voient leurs activités chuter et par conséquent doivent renoncer à leurs objectifs. Toutes ? Non ! Certaines d’entre elles ont réussi à maintenir leurs activités et ainsi à faire de cette crise une opportunité, c’est le cas de Teleperformance.
Le groupe Teleperformance, un leader mondial des services aux entreprises en solutions digitales intégrées et qui emploie plus de 330 000 personnes à travers le monde, a maintenu son activité, préservé ses clients, tout en protégeant l’ensemble de ses collaborateurs. Il convient donc logiquement de s’intéresser aux spécificités de la gestion de crise COVID par cette entreprise. Comment combiner protection des salariés, exigence du résultat et crise globale ? Cette équation est-elle insoluble/impossible ?
Un grand merci à l’équipe de Teleperformance qui nous a accordé cet entretien afin que nous puissions échanger sur le vécu de cette crise par un groupe multiculturel, toujours en activité, et présent dans 80 pays.
La position de Teleperformance dans la crise COVID
Pour Teleperformance, la crise n’a pas débuté le 17 mars mais dès début février. En effet, plusieurs semaines avant que l’épidémie n’arrive jusqu’à nous, en Chine, un site du groupe est fermé sur décision des autorités locales. Le centre est alors désinfecté, les mesures barrières sont mises en place et des masques sont distribués, ce qui permet à Teleperformance un redémarrage rapide des activités avec l’accord des autorités chinoises.
Le moment de bascule dans cette crise est la propagation de l’épidémie au continent européen par l’Italie. Dès cet instant, l’ensemble de l’équipe dirigeante de Teleperformance saisit l’ampleur possible que la crise peut prendre. Le groupe met alors en place un plan d’action globale qui a pour priorité de « protéger la santé de toutes les parties prenantes » selon les mots de Daniel Julien, président directeur général et cofondateur du groupe. Il met aussi en avant la volonté du groupe de « garantir la poursuite d’activité des clients ». Ainsi, bien avant que le virus ne touche massivement la France, Teleperformance avait choisi son plan d’action : se battre contre le COVID tout en continuant à servir ses clients.
Pour ce faire, Teleperformance met en place un comité mondial de crise COVID. Ce comité a pour mission de suivre le développement de l’épidémie, d’informer et soutenir les principaux décideurs et de coordonner rapidement les efforts de réponse. Fort de son expérience asiatique, Teleperformance met en place de multiples mesures : respect des recommandations de l’OMS, politique de distanciation sociale, nettoyages fréquents et renforcés de l’ensemble des installations du groupe, politique stricte d’interdiction de déplacement, disponibilité adéquate aux gels hydroalcooliques, dépistage des températures à l’entrée des sites quand cela est possible, commande de masques. Les bonnes idées ne manquent pas et très rapidement la recherche de solutions innovantes et de partage de bonnes pratiques soutiennent la gestion de crise de l’entreprise.
Clé de voute du dispositif de continuité des activités, Teleperformance s’est massivement tourné vers le télétravail, que le groupe encourage et pratique depuis de nombreuses années. Si aujourd’hui le groupe compte près de 80% de ses effectifs en télétravail (contre environ 5% avant la crise), la transformation des activités en quelques semaines a été un tour de force qui n’a pas été sans difficultés. Il a fallu d’abord convaincre les clients de la nécessité de se transformer pour la santé des collaborateurs et pour la poursuite des activités. Ensuite, ce sont les contraintes locales d’accès aux réseaux qu’il a fallu gérer et tout cela en garantissant la protection et la confidentialité des données.
Les atouts de Teleperformance dans cette crise
Une organisation efficace et résiliente
Teleperformance a su gérer la crise tout en maintenant son activité grâce à de nombreux atouts, dont notamment son organisation. Le groupe peut en effet s’appuyer sur des « process » solides et efficaces. L’entreprise est résiliente et sait capitaliser sur l’expérience passée : l’équipe nous apprend ainsi que « depuis la grippe A, nous avions déjà intégré des gestes barrières et le matériel de désinfection à nos politiques santé et sécurité ». La prévention et la communication ont ainsi pu être rapide d’autant plus qu’il existe une véritable culture de de la santé et de la sécurité au sein du groupe.
Les processus opérationnels ont également été un atout pour la mise en place du télétravail. Dès début avril, 50% des effectifs étaient déjà en télétravail et 64% fin avril et 80% aujourd’hui. Teleperformance s’est ainsi appuyé sur ce mode de travail pour que la transition dans l’urgence sanitaire se fasse aux mieux.
L’efficacité du process opérationnel de Teleperformance se constate également dans ses outils de management. En effet, l’entreprise a mis en place un système de management qui permet de recruter, former, manager, le tout en étant à distance.
Cette organisation permet au groupe de s’adapter à la crise mais aussi et surtout d’être « rapide et agile » selon les mots de Daniel Julien. L’exemple de l’action du groupe pour la ville de Tarente en Italie est parlant : à la demande des autorités de la ville, Teleperformance a fourni rapidement à la population des informations essentielles sur la livraison à domicile de nourriture et de médicament et à propos de la mise en place de bons d’achats. Les autorités tarentines ont à plusieurs reprises salué l’efficacité du groupe.
Un leadership fort et des équipes soudées
L’un des atouts non négligeables de Teleperformance dans cette crise est son leader, Daniel Julien. Il s’adresse chaque semaine à ses collaborateurs dans une volonté de fournir une information transparente sur la situation de l’entreprise, les stratégies globales mises en place et les perspectives d’avenir. Il a pris en charge la gestion de crise en prenant la direction du comité mondial COVID, qui réunit « une centaine de personnes de moins de 45 ans chargé de trouver des solutions innovantes et de retranscrire dans l’ensemble des pays les décisions du groupe ». A la manière de la « Force de réflexion rapide » de Patrick Lagadec, chaque collaborateur peut intervenir. Le but : qu’aucune bonne idée ne soit perdue et qu’aucun angle mort ne puisse subsister. Il a aussi mis en place une vie sociale virtuelle avec le « For Fun Festival », pour inviter ses équipes à échanger et communiquer artistiquement malgré la situation. Daniel Julien exprime aussi dans des communiqués ou dans la presse sa « fierté » envers ses collaborateurs et sa vigilance quant à leur sécurité. Cette reconnaissance permet une cohésion dans le groupe.
Cet exemple par le haut a par ailleurs des répercussions positives dans le groupe. Plusieurs initiatives locales sont ainsi apparues pour fédérer les équipes en ces temps troublés. Teleperformance en comptabilise plusieurs : un haircut challenge dans une équipe, des lunch zoom ou tea time zoom dans d’autres, des cours de sport en ligne, etc. Ces initiatives sont fondamentales pour vaincre l’isolement et créer un engagement pour le groupe et sa culture d’entreprise.
Une solidité financière
Teleperformance peut également s’appuyer dans cette crise sur sa solidité financière. Le groupe nous rappelle ainsi « la sécurisation des lignes de crédit supplémentaire pour plus de 700 millions d’euros en complément des facilités de 500 millions d’euros disponibles actuellement ». De fait, Teleperformance est armé financièrement face à la crise. Le groupe utilise ses fonds pour assurer la sécurité de ses « parties prenantes » par l’achat de masques par exemple mais aussi « pour assurer la fourniture des moyens matériels nécessaires à un télétravail efficace et sans obstacle ».
L’impact sur la réputation
Un impact négatif à relativiser
Le secteur des centres d’appels souffre d’un déficit d’image auprès de l’opinion publique. Beaucoup d’idées reçues circulent à son sujet et sont diffusées notamment dans la culture populaire, avec le film « Slumdog millionaire » par exemple. Avec la crise COVID-19, cette mauvaise image n’a pas changée et le groupe Teleperformance reste une cible de choix pour de nombreux détracteurs. Des fakes news peuvent ainsi circuler, comme celle sur le refus de Teleperformance de mettre en place le télétravail et la lenteur d’application. A ce sujet le groupe a assez communiqué pour montrer qu’elle était infondée et ne prenait pas en compte la réalité : une entreprise de 330 000 employés ne transitionne pas vers le télétravail en quelques jours.
Certains médias ont aussi fait état de mauvaises conditions de travail au sein de Teleperformance. Il convient ici de rappeler que le groupe est reconnu par le Comité d’Entreprise Européen pour son action dans la protection de ses employés. De plus, l’équipe de Teleperformance ajoute que le groupe se voit régulièrement décerné le prix « Great place to work » et ce dans plusieurs pays où il est implanté. Tout est mis en œuvre pour assurer la sécurité physique et financière des collaborateurs.
Un impact positif par l’action de Teleperformance
L’impact réputationnel de la crise COVID est paradoxalement bien plus positif que négatif pour le groupe. En effet, l’entreprise et ses 330 000 employés ont démontré durant cette crise que la continuité d’activité pour leurs clients n’était pas un vain mot. Le groupe assure le back office et les services critiques pour de nombreuses activités essentielles dans les secteurs de la santé, la distribution, l’énergie ou encore les services publics. Ce faisant, le choix du groupe de maintenir son activité tout en assurant la sécurité de ses agents lui a permis de fidéliser ses clients.
Teleperformance a également la charge de la hotline COVID dans 13 pays. Daniel Julien se dit d’ailleurs « vraiment honoré » de la confiance des gouvernements envers son groupe. De fait, Teleperformance est ainsi un acteur essentiel de la lutte contre le COVID en fournissant à ses 13 pays les services essentiels d’assistance à distance pour les aider à informer, protéger et rassurer leurs populations.
Au-delà de cette aide essentielle aux gouvernements, Teleperformance agit aussi de sa propre initiative dans plusieurs pays. En Colombie, le groupe a organisé une campagne caritative pour venir en aide aux citoyens les plus vulnérables face à la pandémie. Teleperformance a ainsi récolté plus de 100 000 colis alimentaires et environ 13 milliards de pesos colombiens. La crise COVID-19 permet ainsi au groupe de montrer son efficacité et son rôle essentiel dans nos sociétés.
Cette crise sera peut-être l’opportunité pour redorer le blason d’un secteur trop souvent décrié mais pas assez reconnu pour sa grande utilité.